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En hommage à Monsieur Pascal Fulacher
et la revue Art et métiers du livre

De Simone Benoît-Roy


Ceux et celles qui aiment passionnément le beau livre, le livre édité sur papier fin, pur fil, avec de magnifiques gravures illustrant intelligemment le texte, dans un caractère qui convient à l’époque, et une mise en page aérée et généreuse, regretteront profondément la disparition de la revue Art et métiers du livre telle quelle était présentée par les Éditions SARL sous la direction et la rédaction de monsieur Pascal Fulacher, dont le dernier tirage portait le numéro 223.

Grâce au travail intense et appliqué de monsieur Fulacher, nous avons pu, nous de l’étranger, profiter d’une mise à jour annuelle de toutes les publications intéressantes concernant le livre d’art, à savoir: les éditeurs de beaux livres animés par une recherche de qualité. Les papetiers, rencontrés à travers un livre exceptionnel sur l’histoire du papier des origines à nos jours; un trésor, une mine de renseignements, un plaisir de lecture que l’on reprend sans jamais se lasser. La marbrure qui, toujours grâce à la revue, nous donne un aperçu de son histoire à partir de l’Orient et de son développement en Occident; sans oublier les imprimeurs-typographes, les bibliophiles, les mécènes, etc. Ces ressources nous ont offert au fil du temps une connaissance du milieu que nous ne pouvions d’aucune autre façon acquérir, compte tenu de la distance physique qui nous sépare.

En ce qui me concerne, mon adhésion à cette revue remonte à son balbutiement et son apogée fut atteint avec l’arrivée de monsieur Pascal Fulacher. Grâce à lui, et j’espère que tous les relieurs professionnels en sont conscients, nous avons pu prendre une certaine place dans le monde de la reliure d’Art. Avant lui nous étions, à toutes fins utiles, inconnus en Europe. Suite à sa visite au Québec à l’occasion de la biennale de 1988, tout a changé. Monsieur Fulacher a rigoureusement visité chaque atelier, interrogé chaque relieur, sans discrimination aucune, afin de se forger une opinion sur la reliure d’art au Québec.

De ce court séjour chez-nous, nous avons bénéficié d’un article de fond d’une vingtaine de pages. Ceci était exceptionnel suivant la politique pratiquée par la revue. Si vous pouvez vous référer au numéro 149 de mars-avril d’Art et métiers du livre, et relire attentivement ces pages, vous constaterez, comme moi, le bien fondé de ces articles, leur diversité, la précision des données et l’esprit d’ouverture à notre égard. Ils sont fouillés, adéquats, précis. Monsieur Fulacher a eu recours aux connaissances de madame Jacqueline Hallé, historienne, pour établir un résumé succinct de l’histoire de la reliure au Québec, dans l’espoir d’intéresser ces lecteurs relieurs français. Ce fut le cas puisqu’un nombre assez imposant de relieurs chevronnés, de réputation internationale, sont venus assister à la première biennale au Québec, présentée à la galerie d’Art de l’université du Québec à Montréal. Monsieur Fulacher a enchaîné avec un compte rendu sur les relieurs contemporains et je cite:

« Enthousiasme, ténacité et dynamisme sont les trois principales qualités des relieurs québécois. En quelques dix années, grâce à une poignée de relieurs néophytes, la province de Québec s’est hissée aux premiers rangs, avec les États-Unis, le Japon et l’Australie, des pays récemment convertis à la reliure d’art. Des dix provinces constituant la Confédération Canadienne, le Québec est l’un des seuls États avec l’Ontario, représenté par madame Shelagh Smith, de la "Canadian Bookbinders and Book Artists" qui participent de façon efficace et continue au rayonnement de la reliure, d’un point de vue à la fois quantitatif et qualitatif. L’histoire relativement récente du Québec, découvert au XVIe siècle par Jacques Cartier, et l’absence de tradition qui en résulte—que les relieurs québécois eux-mêmes considèrent comme un atout– fait de cette contrée un pays (neuf), ouvert à tous les possibles. Une reliure d’art nouvelle, inspirée de la grande tradition française, est apparue de l’autre côté de l’Atlantique. Nous nous sommes rendus sur place afin d’en situer l’évolution actuelle.»

Inutile de préciser que ces pages, très généreuses, qui ont fait connaître également David Carruthers en tant qu’artisan papetier et plusieurs de nos talentueux graveurs, nous ont largement aidés, chacun dans notre discipline, à nous affirmer et croire en un avenir meilleur. À telle enseigne que le dernier numéro paru sous la direction de monsieur Pascal Fulacher consacrait la couverture de la revue ainsi qu’un article de fond à l’une des nôtres, Louise Genest. Je suis infiniment reconnaissante envers monsieur Fulacher pour l’aide qu’il nous a apportée tout au long de ces années et je désire lui exprimer, en mon nom et au nom de mes collègues, tous nos remerciements. Nous souhaitons et espérons ardemment qu’il continuera, sachant son grand talent de communicateur et de diplomate, à œuvrer dans le domaine du livre, DU TRÈS BEAU LIVRE!