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La composition graphique
Les graphistes



La fabrication d’un livre d’art soigné demande de la patience, du savoir et du doigté. Il faut avoir suivi le travail d’un relieur en atelier pour comprendre à quel point l’achèvement d’un seul ouvrage est exigeant en temps, en énergie et en créativité. À cause de cela, il ne faut pas s’étonner qu’il se montre pointilleux dans le choix des écrits qu’il entend consacrer, car c’est bien cela qui se produit. Dans le monde actuel de consommation et d’éphémère, les travaux d’édition de haut niveau ne sont pas fréquents. Mais justement à cause de cela, ils acquièrent une valeur qui rend manifeste le fait que l’ouvrage en cause mérite d’être lu, regardé et conservé.

Pour que le Livre des origines s’inscrive dans les annales culturelles, il fallait accorder un soin jaloux à toutes les étapes de sa fabrication. Les relieurs qui forment l’équipe de l’exposition ont fait un excellent travail, mais encore fallait-il leur procurer un texte significatif minutieusement établi et disposé sur un papier de qualité.

Peut-être parce que l’édition électronique a été en quelque sorte démocratisée au cours des dernières années, le travail des graphistes n’a certainement pas de nos jours la reconnaissance qu’il mérite. En cela, il ressemble à celui des relieurs qui ne prennent pas toujours le soin d’apposer un colophon. Pourtant, si l’auteur d’un livre s’occupe de la signification alors que le relieur pend en charge la présentation, il est clair que la mise en page effectue en quelque sorte la liaison entre les deux.

Nous avons confié ce travail intermédiaire à deux artistes très prometteurs. Ils ont étudié le texte et le thème pour développer un style parfaitement idoine. Le défi était de taille parce qu’ils ne pouvaient prévoir, au moment où ils se sont mis en œuvre, ce que produiraient les relieurs. Comment alors rendre le caractère de la huronnie et le ton du récit d’André Ricard sans limiter les possibilités d’expression visuelle ? Leur réponse nous a paru juste et pleine de finesse.

Jean Michaud s’est intéressé à la communication graphique ainsi qu’à la recherche et création aux premier et deuxième cycles universitaires. Pour confronter ses pratiques, il s’est lancé dans l’enseignement à l’Université Laval. Il y explique les fondements du langage graphique, l’édification des systèmes de signes et les démarches de création spécifiques au design appliqué. Cette occupation ne l’empêche pas de réaliser des projets de création, dont le support peut être des images corporatives ou des timbres. Dans la dernière année, ses recherches personnelles l’ont amené à intégrer le multimédia dans ses expérimentations formelles.

Stéphane Vallée, de son côté, s’est d’abord spécialisé en arts plastiques. Pendant cinq ans, il a enseigné cette matière à Windsor en Ontario, de même que la photographie. Puis il est revenu aux études en communication graphique pour diversifier et affiner ses moyens d’expression. Au deuxième cycle à l’Université Laval, il a examiné la dualité entre la lecture lisible et visible de la typographie. Les résultats de ses travaux ont été présentés dans une exposition solo intitulée « Duel » à la Galerie des arts visuels de l’Université Laval, ce qui lui a valu une nomination au Prix Grafika 2001. Il enseigne maintenant les notions de langage graphique, de composition, de typographie et de processus créatif. Parallèlement, il accepte des mandats de concepteurs qui lui permettent de se faire la main. En 2004, il a été invité à diriger un atelier à l’École de création « intuit/lab » pour les métiers de l’image de Paris.

Les lieux d'exposition
La Bibliothèque Gabrielle-Roy
La Grande Bibliothèque

La Bibliothèque Gabrielle-Roy
En langue amérindienne, Québec signifie « l’endroit où le fleuve rétrécit ». Difficile de mieux décrire la situation de la Vieille Capitale, à tout le moins du point de vue de ceux qui ont dû en apprivoiser les voies de communication naturelles pour développer le Nouveau-Monde. La vie a bien changé depuis le dix-septième siècle, âge d’or de l’impérialisme français, anglais et espagnol. Cela se voit entre autres par le fait que les autochtones sont devenus une « minorité visible » et que la géographie du Canada a été rebaptisée d’après une imagerie religieuse et laïque importée.

Depuis les promontoires de Québec, les « indiens » ont été refoulés vers la basse-ville, puis ils ont dû migrer vers le nord pour s’y retrouver dans des « réserves ». À mi-chemin entre la banlieue rapprochée et le centre-ville, il n’y a plus guère d’autochtones non plus. Ils ont été déportés par un commerce lucratif qui n’a malheureusement pas profité également à tout le monde. Remplie de manufactures et d’usines, parcourue par une grande rivière, cette partie de la ville a obéi à une logique marchande, elle a été transpercée par des autoroutes suspendues, elle a vu son plus beau temple avalé par un centre commercial et elle a permis une élimination radicale de la nature de laquelle les citadins commencent à peine à se rétablir.

C’est là que se trouve la bibliothèque Gabrielle-Roy, hôtesse de l’exposition Le livre des origines, dans un quartier plein de vie, d’affrontements et de contradictions. L’immeuble, en lui-même, a constitué un défi urbain des plus audacieux : construire un cénacle du savoir là où se trouvait une population en rupture avec la culture par la force des choses. Malgré de vives inquiétudes, la bibliothèque a été bien acceptée. Les mieux et les moins bien nantis se sont mis à la fréquenter en même temps, ce qui a déclenché un processus de mutation qui a sensiblement changé le paysage physique et culturel de la ville. Des signes de déclin ont progressivement disparu au profit d’un lustre de meilleur augure.

En vingt-deux ans, la bibliothèque Gabrielle-Roy est devenue une véritable institution. L’emblème aussi d’une rupture et d’une continuité. Il a fallu beaucoup d’efforts de persuasion pour qu’elle voie le jour, et une bonne observation des us et coutumes québécois pour qu’elle devienne un succès. Pour un temps, cette formidable mémoire aura pour centre névralgique Le Livre des origines, ce qui est judicieux puisque dans un apparat absolument extraordinaire, il interroge la sensibilité et l’intelligence d’un peuple fortement marqué par les à-coups de l’histoire. L’écriture, la reliure, la salle d’exposition et l’édifice de la bibliothèque, comme cela se produit rarement à ce point, s’amalgament dans le temps présent autour d’une légende huronne. Reste à savoir s’il sera possible de l’interpréter sans soubresauts dans une mise en scène qui marque autant la distance qui nous sépare des origines.

La Grande Bibliothèque
Formée du regroupement inédit de la Grande Bibliothèque du Québec et de la Bibliothèque nationale du Québec, la nouvelle Bibliothèque nationale du Québec (BNQ) combine, en un riche éventail de tous les domaines du savoir, la conservation du patrimoine documentaire national et la diffusion à grande échelle de vastes collections québécoises et universelles.

Depuis sa création, la BNQ acquiert, par dépôt légal, l’ensemble des nouveaux documents publiés au Québec : livres, revues et journaux, documents cartographiques, livres d’artistes, partitions musicales, estampes, affiches, reproductions d’œuvres d’art, cartes postales, enregistrements sonores, logiciels et microformes (microfiches et microfilms). Elle procède aussi à l’achat rétrospectif de publications, ce qui lui a permis d’élaborer une collection quasi exhaustive du patrimoine documentaire québécois ainsi qu’un fonds important de publications étrangères sur le Québec. Du premier livre imprimé au Québec au dernier cédérom de l’année, les collections de la BNQ englobent plus de quatre millions de documents.

Avec la construction, au centre-ville de Montréal, d’un immeuble public vaste et convivial, et grâce à l’ajout de nombreux services électroniques, la BNQ offre à tous les Québécois, depuis le printemps 2005, un accès sans précédent à leur patrimoine ainsi qu’à la culture contemporaine d’ici et d’ailleurs. Dans ce nouvel espace, les collections de la BNQ – 340 000 livres notamment – ont été considérablement enrichies par les quelque 450 000 livres et la collection de revues de la Bibliothèque centrale de Montréal ainsi que par 475 000 nouvelles acquisitions, bases de la collection universelle de prêt et de référence. Multivocationnelle, la Grande Bibliothèque est aussi un lieu animé puisqu’on y trouve un auditorium, une salle d’exposition, un café-restaurant, des espaces pour les bouquinistes et des aménagements extérieurs. De plus, la Bibliothèque dispense des services spécialisés destinés à plusieurs clientèles, notamment les jeunes de 13 ans et moins, les gens d’affaires, les nouveaux arrivants, les membres des communautés culturelles et les personnes atteintes de déficiences visuelles ou autres.

En utilisant notamment les nouvelles technologies, la Bibliothèque nationale veut procurer aux citoyens de tout le Québec un accès facile et pratique à de nombreuses ressources bibliographiques et documentaires. Son catalogue complet est accessible par Internet, tout comme des dizaines de milliers de documents numérisés : à ce jour, 30 000 livres, enregistrements sonores, cartes postales et affiches sont déjà disponibles en format numérique. Par la mise en place de systèmes à la fine pointe de la technologie, la Bibliothèque nationale vise entre autres la mise en commun des catalogues électroniques des bibliothèques publiques du Québec afin d’offrir aux usagers un accès simplifié à l’ensemble des ressources documentaires disponibles sur le territoire. Cette architecture électronique, en même temps qu’elle donnera aux services à distance de la BNQ un élan supplémentaire, permet de mieux évaluer et suivre la demande et le développement de services en plus de créer des solutions de type numérique relatives au prêt entre bibliothèques. Enfin, des liens avec les ressources électroniques d’autres institutions internationales multiplieront d’autant les points d’accès à la grande toile de la connaissance.

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